Trois jours. C’est le temps que nous avons pour explorer ce petit coin de Catalogne si propice à l’observation d’oiseaux. Afin de varier les plaisirs, deux jours seront consacrés à l’exploration du delta (du 26/12/2015 au 27/12/2015) et une journée consacrée aux steppes situées au sud de Lleida (28/12/2015: Màs de Melons et aérodrome d’Alfés).
L’excellent guide « Where to watch birds: Northern and Eastern Spain » accompagne notre périple. A noter également que nous avons déjà foulé cette terre il y a déjà quelques années, en Mai 2012 (voir l’article Delta de l’Ebre en Mai).
Delta de l’Ebre
Notre expédition commence avec un temps magnifique et une température quasi printanière à l’observatoire de l’Encanyissada. Notre première halte d’environ 1h30 nous permet d’admirer la patience du héron cendré, immobile, en quête d’un déjeuner. Parmi les espèces remarquables qui peuplent l’étang, nous notons la présence du Chevalier aboyeur (10) de la Bécassine des Marais (1) du Courlis Corlieu (1), du Grèbe Castagneux (5) et de la Talève Sultane (2). Le Râle d’eau, d’habitude si discret se voie sans trop d’efforts: au moins 3 individus longent les roselières. Les températures de cet hiver doux ne favorisent pas la présence des canards: seul un Canard Chipeau se fait discret parmi les dizaines de Colverts. Parmi les rapaces, les Busards des Roseaux viennent régulièrement stresser limicoles et anatidés qui peuplent l’étang.
L’identification des différents passereaux commence à porter ses fruits lorsqu’un jeune Gorgebleue à miroir blanc passe furtivement dans nos jumelles. Nous quittons l’observatoire pour prendre la route qui longe l’étang. Une petite ferme dotée d’un poulailler a attiré un couple de Fauvettes mélanocéphales. La Cisticole des joncs et la Bouscarle de Cetti peuplent également les roseaux qui bordent la route.
L’ensemble des observations de l’Encanyissada sont disponibles sur Birding Notebook sous les liens suivants Mirador de Patrau et jardin de l’Encanyissada.
Nous continuons notre route pour arriver à l’observatoire de la Tancada où les Flamants roses se sont rassemblés par milliers mais la faible diversité d’espèces ne nous retient pas très longtemps. Nous finissons la journée sur la Punta de la Banya. Les centaines de Bécasseaux variables virevoltent sur fond de soleil couchant, un spectacle qui ravirait tous photographes. Les Bécasseaux Sanderling (10) se distinguent des variables par leur plumage hivernal blanc. Le Chevalier aboyeur (20), Chevalier gambette (20), Courlis corlieu (1), Gravelot à collier interrompu (3), Petit Gravelot (20), Pluvier argenté (2), Tournepierre à collier (3) sont également bien visibles.
A l’aube du 2ème jour, nous voilà arrivés à l’observatoire de l’Alfacada qui offre une magnifique vue à 360° sur les rizières et l’île de Buda: la longue-vue y est par contre indispensable à moins que votre attention se porte uniquement sur les pouillots véloces qui peuplent les roselières. Nous distinguons, au loin, dans l’étang de l’île, plusieurs milliers de canards. Leur identification, un à un est difficile vue la distance, mais nous reconnaissons aisément le Canard Souchet (100), le Canard pilet (2) ainsi que le Tadorne de Belon (4) et la Sarcelle d’hiver (100). La Barge Rousse (10) occupe également les lieux. Ce joyeux regroupement hivernal se fait sous la surveillance du Busard des Roseaux (3) en train de déguster un Canard Colvert sur les berges de l’étang.
La route entre Sant Jaume d’Enveja et l’Alfacada est presque aussi fructueuse que le mirador. Les limicoles trouvent leur nourriture dans les rizières qui bordent le canal. La Barge rousse (10), le Combattant varié (15) et le Pluvier doré (30) accompagnent les très communs Vanneau huppé (10) et Bécasseau variable. Le premier groupe d’Ibis falcinelles (100) et quelques Combattants variés (15) donnent l’occasion de faire quelques clichés. Enfin le Bihoreau gris (1) (en théorie migrateur) témoigne de la douceur du climat.
L’observatoire de Riet Vell est notre prochaine étape. Peu de nouveautés ici, mis à part la présence abondante de Talève sultane (80). Tout comme à l’Encanyissada, le Râle d’eau (1) est facilement remarquable. Il est désormais temps de quitter la moitié sud du Delta pour se concentrer sur les points d’intérêts situés au nord du fleuve. Nous traversons la ville de Deltebre pour rejoindre l’observatoire de Rodell de les Formigues, mais une légère erreur de co-pilotage nous amène du mauvais côté du canal … tant pis, nous déjeunerons là. Et preuve que certaines découvertes se font par erreur, une silhouette étrange se détache du bord du chemin: suffisamment rare pour le signaler, une Effraie des clochers est en train de dormir à même le sol. Quelques centaines de mètres plus loin, direction plein nord, le chemin offre une vue dégagée sur le bassin. Un tour d’horizon à la longue vue révèle l’Avocette élégante (50). La Sterne caugek (2) est également de la partie et multiplie les plongeons à quelques dizaines de mètres de nous.
Direction Punta del Fangar pour notre avant dernière étape. Sans grande convictions, nous nous adonnons ici au « seawatching ». Il est vrai que de regarder le large à la recherche d’oiseaux de mer est parfois infructueux. Mais ce n’est pas le cas ici. Des bandes de Puffins volent par groupes de 5 à 10 individus vers le sud. Difficile de dire de quels Puffins il s’agit: les signes distinctifs sont invisibles à cette distance. Après consultation de Steve West, il s’agit certainement du Puffin des Baléares, plus commun sur cette partie de la côte que le Yelkouan – quoi qu’il arrive il s’agit là d’une belle observation, le Puffin des Baléares est dans la case « Danger critique d’extinction » du classement UICN. Quelques minutes de recherche supplémentaire révèlent la présence d’un Labbe (très certainement un Grand Labbe) et du Grèbe à cou noir (1).
Nous nous dirigeons en fin de journée vers Les Olles. Après quelques minutes de marche nous restons un moment sur l’observatoire qui donne à la fois sur l’étang, côté ouest, et sur le large, côté est. Le passage du Bihoreau gris (15) et la présence de la Huppe Fasciée (1) confirme que certains migrateurs se sont accommodés de la douceur de cet hiver.
Steppes de Lleida
Finies les riches étangs du Delta et place à un univers plus ingrat mais non moins intéressant. Après une nuit à l’Hisenda Pépito, fameuse auberge de Riba-Roja d’Ebre, nous voilà en route vers le sud de Lleida et plus particulièrement au Mas de Melons. Notre route croise des vergers d’oliviers … l’occasion d’une « halte passereaux ». Les groupes de Linottes mélodieuses font presque de l’ombre aux plus discrètes Fauvettes des jardins (5) et Fauvettes mélanocéphales (1).
Nous nous détournons de notre itinéraire pour explorer le village de Granyena de les Garrigues. Les maisons de pierre sont le refuge du Monticole Bleue (1). Le mâle fait une furtive apparition dès notre arrivée et après quelques dizaines de minutes de recherche apparaît plus longuement à l’angle d’un toit. Nous passons en tout une bonne heure à sillonner ce village délaissé par les hommes où la Nature a repris ses droits. L’habitat est propice à la Chevêche d’Athéna mais aucune trace …
Nous voilà au Mas de Melons. Depuis la route principale qui traverse la réserve, de nombreux chemins partent se perdre dans les steppes. Notre première étape est le centre d’accueil (fermé à cette époque). Nous y rencontrons Steve West qui nous indique une zone plus au nord pour éventuellement voir les Gangas. Longue-vue déployée, jumelles autour du cou la recherche des Gangas est infructueuse mais un Aigle Royal (mâle adulte) surveille, tout comme nous, la faune environnante: Fauvette Pitchou (1), Pie-Grièche Méridionale (1) côtoient deux Renards Roux qui passent tout près d’un petit groupe de Perdrix Rouge (3) visiblement indifférentes de la menace qui rôde… Parmi les rapaces le Milan Royal (2) et le Busard Saint-Martin (1) peuplent également la réserve.
La toute dernière étape de notre périple Catalan se situe à l’Aérodrome d’Alfés. Bien entendu, ce lieu est moins préservé que le Mas de Melons mais notre visite en Mai 2012 avait été plutôt fructueuse (à l’époque Aigle Royal et Coucou Geai notamment). En cette période hivernale nous retrouvons malgré tout une espèce migratrice: encore la Huppe Fasciée (2)! Sans surprise nous contactons le Cochevis Huppé (5) et l’Alouette Calandre (1). Nous prospectons les abords de l’aéroport mais pas de grandes découvertes ici.
Direction l’échangeur de l’autoroute (ou nous voyons pour la première fois la Cigogne Blanche (5) ) pour un retour à la maison qui prendra prés de 6 heures.
Quelle conclusion apporter à notre excursion? Quelle est l’image que nous garderons en tête? Très certainement l’imprévisible, l’inattendu … comme cette Effraie des Clochers endormie au bord d’un chemin à la merci des prédateurs! Le Delta de l’Ebre surprend autant par la diversité des espèces que par la qualité des infrastructures (observatoires et mirador). Deuxième zone humide d’Espagne, c’est une étape incontournable pour tous les ornithologues confirmés où même les simples amateurs.
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